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journal permanent | 31 janvier 2013

jeudi 31 janvier 2013, par sebmenard

Bande son du matin : Bjorn Berge — puis "Peur" (François Bon et Dominique Pifarely) :

on se mettrait à six à huit à dix on rassemblerait la totalité de nos peurs depuis tout petit on serait plus fort
 
la peur du noir
 
et on ferai la liste la liste de chacun et puis la grande liste de tout
 
j’ai peur des gens calmes
 
j’ai peur des gens autoritaires j’ai peur de ceux qui se croient obliger de sourire comme s’il vous fallait les caresser ensuite
 
j’ai peur de la nuit quand elle est maussade juste une voiture qui passe de temps en temps calme

(tapé directement avec la voix le son dans les oreilles)

(donc sans doute infidèle)

(et je constate au passage que je ne sais pas absolument pas comment j’ai pu me procurer cet enregistrement)

(voir cette page sur le Tiers Livre)


Écrire ces mots-là — bande-son — ça me donne envie de relire ce texte de Kill me Sarah.


Choses techniques qui deviennent urgentes : mettre à jour le site — organiser cet espace d’écrire journalisé.


Écouter une voix forte — particulière — une voix qui nous bouscule nous secoue depuis longtemps est aussi un risque — j’écoute donc "Peur" de François Bon dès le matin et après avoir appuyé sur le symbole "play" de mon lecteur numérique je viens d’annuler toute possibilité d’écriture immédiate en même temps — c’est à la fois un saut immense et un risque — parce qu’il faudra s’extirper de cette voix — parce qu’il faudra reprendre langue — mais cette secousse sans doute nécessaire — ce qui nous tient là.


La voix de l’écrit (Christian Prigent)

3. Objectif : récuser l’organe vocal « personnel », tendre à un anonymat violent, évacuant le plus possible ce qui, dans la modulation vocale, ferait signe pour la « psychologie », l’expression émotionnelle, la vraisemblance mimée, la pertinence des « effets », l’adéquation du semblant vocal au réel évoqué. C’est l’envers de la voix du comédien, qui calcule ses effets émotionnels et silhouette des postures subjectives. L’envers aussi de la voix de l’orateur, qui module la plénitude de contenus discursifs. Mais ce n’est pas la voix chantée : pas de sortie radicale hors du naturalisme de la parole, pas de soumission rhétorique à une partition et à la pure profération soufflée que porte la musique. La voix-de-l’écrit maintient l’ambiguïté, les contradictions : elle n’excède pas le langage, aucune loi autre ne lui permet d’en reléguer la norme dans une aisance détachée. C’est une musique ratée, lestée des décombres sémantiques, et travaillant dans un entre-deux indécis où ce ratage est justement ce qu’elle vise à faire surgir. C’est un medium qui porte les contenus sémantiques mais en même temps les hache en une modulation tordue qui fait signe pour la torsion du geste d’écriture. C’est l’accent mis sur cette torsion venue de l’écrit qui fait que je me sens à la fois proche et lointain de la poésie dite « sonore ».

Questionnement en ce moment vis-à-vis de la lecture voix haute et de l’écriture — quelque chose de certain : pratiquer — l’un comme l’autre.


Ceci dans le journal de Fred Griot (livrée précédant le départ dans la yourte) :

ne pas subir, ne plus subir, n’avoir plus à subir. peu en sont capables, peu ont cette absence de choix de ne savoir être autrement que non subissant. et même quand ils endurent, qu’on leurs infligent un joug, ils ne savent être soumis.
c’est essentiellement créer sa vie.

Chose à faire de toute urgence : préparer des petits sacs chargés de graines (oui Richard Brautigan a déjà fait cela) et de poèmes — car il y a urgence — il y a urgence pour les graines et les poèmes.


"Je suis peut-être un clochard dans le port d’Amsterdam
Je suis peut-être un chien dans la ville de New-York."

Wanted Man sur la BO du film La Vie est un miracle.

J’entends cette phrase dans les écouteurs train du retour et je trouve ça magnifique — tout simplement magnifique.


Donc — note pour l’avenir (puisqu’il faudra attendre quelques mois)(est-ce que ce n’est pas déjà rater que de l’écrire) — organiser une vie pleine de possibles.