diafragm

Accueil > Carnets | SebMénard > un récit (provisoire) > Ils viennent

Ils viennent

jeudi 29 août 2013, par sebmenard

proposition 2 : si par une nuit d’hiver un voyageur


Le cheval est sa bête et il lui parle en criant parfois — en allant vers le col de Borşa qui pour venir lui barrer la route — quels indiens pour quel vieillard et les ours alors — il dit qu’il n’a jamais vu d’ours ici qu’ils sont plus au Sud sans doute et que c’est à force de les nourrir — sa charrette chariote chargée chasse sur les boues les flottes s’il pleut — sa charrette chariote chargée chasse dans les poussières si c’est de poussière que le col ce jour-là voulait parler — d’un vieux sac en toile de jute il goutte une bière chaude et sur son front s’écoule les sueurs.

*

Venant d’un autre continent ils marchent — quoi pour les avoir fait fuir quoi pour les avoir mis sur la route — si on écoute leurs poèmes sans doute qu’ils diront qu’il n’y a pas de raison que c’est ainsi et qu’il en sera toujours ainsi — la première fois qu’ils passent le col de Borşa personne ne l’écrira — d’ailleurs personne n’écrira jamais qu’ils passent le col une route un fleuve un continent — personne pour l’écrire puisqu’écrire c’est non ça ne compte pas — donc ils viennent d’un autre continent et ils marchent — ils passent le col de Borşa et là ils dorment — ça sera la première nuit au col de Borşa — c’était il y a plusieurs centaines d’années.

*

Il dit que vivre sera ainsi — il dit que c’est chaque matin on se lève on roule par exemple on prend un train un cheval une bagnole et on a toute la journée pour être ailleurs — peut-être qu’il a peur de ne rien faire sans doute qu’il préfère s’épuiser — son corps ça sera un steak dur un jour et plus rien pour irriguer ses veines — il dit que ça n’a pas de sens la vie qu’on mène et il regarde la vallée du haut du col de Borşa — il tire un clope il dit que c’est le pire les mecs qui produisent des clopes et puis rien — peut-être qu’il s’endort peut-être qu’il fait semblant — d’un coup il se lève et au bar commande deux bières — il dit c’est bien ici on peut redescendre trouver un endroit pour la nuit.

*

Elle porte dans ses bras un bébé tout sec et soif — il fait chaud elle dit et rien pour manger — elle gratte sa peau dure et brune à l’ombre d’un croix en bois — le vent souffle ses cheveux pour acheter de l’eau elle veut de l’argent — un homme il pose une barquette de frites à côté et puis il continue à marcher dans la poussière — la couleur de son petit c’est brun crasse et sa peau ne bouge pas non plus comme il respire alors — après elle jette des cailloux en cachant ses yeux du soleil et des gueules.