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Un jour sur le col de Borşa

samedi 3 octobre 2015, par sebmenard

Un jour sur le col de Borşa on ne connaît pas son nom et rien n’importe sinon les yeux ouverts sauvages les yeux.

Ça se passe un jour d’août — dans une odeur de diésel et de fatigue — dans une odeur de sueur et alors l’air frais des montagnes du nord. On est usés rincés mais tout à fait là encore et sur notre carte il n’y avait rien sur cette route — des virages et des noms — nul trace d’un col. Pourtant nous arrivons au col de Borşa et tout le monde se tait — on écoute encore un peu le moteur et puis s’arrête — on claque les portières dans la poussière et sur les gravats — chacun file de son côté du col et des pierres. Derrière la rambarde en bois le bitume s’étire — on ne connaît pas le nom de nos routes ni même les lieux de nos nuits — on a la gueule sèche des types qui ont trop parlé et personne pour leur dire silence ! — de toutes façons ils n’écoutent rien. Ce jour-là on ne sait rien — du nom des montagnes — du nom des rêves.

Qu’étions-nous venus chercher — peut-être des danses qu’on tourne à plusieurs les nuits et des viandes qui grillent sur les feux — des légumes inconnus et des histoires à faire tenir — c’était au temps des viandes — tout serait différent aujourd’hui. Sur le col il n’y a rien que le silence et les vents — peut-être l’un d’entre nous pour imaginer la présence d’un ours mais c’est un mensonge — peut-être l’un d’entre nous pour prendre une image de cet endroit mais rien n’est sûr — et pourtant nous n’étions pas venu là par hasard. Sur le col — quelqu’un demande de l’argent pour son gosse et un cheval pour courir dans les herbes hautes — sur le col — ils rangent des vieux trucs des friteuses et des fûts de bière — une bagnole passe de temps à autre — les nuages s’entassent là-bas — et nous on cherche un lac salé.

On aurait dit que ce col c’était une sorte de fil rouge — un de ces lieux où revenir toujours — et chaque fois alors on y reviendrait et on se ferait surprendre non pas par le col — mais parce qu’on était de retour.