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Bouvier, Nicolas | Il faudra repartir

lundi 17 octobre 2016, par sebmenard

Indonésie, été 1970

 “ POÊME

Un grand cerf-volant
plus grand que l’homme qui le portait
va-t-il descendre sur son village
moi j’ai le cœur lourd de quitter
cette ville — petit théâtre —
l’avion ne pourra décoler
je resterai ici, jardinier
peut-être
à sarcler et à marauder dans
le vert intense
à faire pousser
le jasmin et l’herbe d’oubli
sous les ailes rouillées des avions
de chasse.“

France, 1957-1958

 “ Journal d’un voyage en France.

 « Mordefrois, c’était Mordefrois qu’y s’appelait… Ah ! la vache… Y m’a jamais fait quéque chose de bien. » Des vieux à moustache qui mangent l’écharpe autour du cou à la table voisine… « Dis, écoute voir… » Parlent de leurs ouvriers. Menuiserie en grand, ferronnerie ? On sait pas. Le rosé leur monte aux pommettes, le ton monte… « Ah ! toi t’es marrant, j’ai des frais, moi ! » Tout cela extrêmement virulent. Puis la patronne traverse tout le bistrot, un plat doré à la main pour me faire passer sous le nez « le gâteau de riz du chef ».

Nevers. Partis crevé, mais crevé. Passé de bonne heure chez Thierry et Floristella1, l’œil tout net et tout réjoui devant des bols de café… fumant. Fait la route très vite, et depuis Montargis, sous la pluie. Grands paysages tristes tendus de gris, route bonne et passante. J’étais trop fatigué et tendu pour m’installer à la diable, j’ai recherché l’hôtel Napoléon où je me souvenais avoir passé quand j’étais tout petit. (…)“


Bouvier, Nicolas, Il faudra repartir, Payot. (textes réunis par François Laut)

  1. À Paris chez les Vernet. ↩︎