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c’qu’on vient chercher dans l’atelier

lundi 27 décembre 2010, par sebmenard

réflexion : l’atelier, c’qu’on vient y chercher, pourquoi.

ce texte fait suite à la dernière séance d’atelier,le dialogue à rien qu’un seul qui parle

c’est bientôt la fin de la séance maintenant ça te dérange plus vraiment de lire comme ça devant ceux qu’tu connais pas et comme il le dit - c’qu’il y’a de biographique finalement eux - ceux qui écoutent - ils le voient pas vraiment enfin quand la consigne est respectée ça tient bien comme ça et ils passent tout à fait ailleurs - ils ont leurs images et elles restent là les images et on les bouscule comme on veut nous avec nos mots ça passe pas exactement comme ça de l’un à l’autre -

bon - c’est vrai que c’est pas très clair l’idée c’est surtout de s’interroger et comprendre c’qu’on vient chercher dans l’atelier d’écriture - parce que c’était pas la première fois l’autre soir tu l’as entendu dire

c’est fou parce que parfois on se demande ce que vous venez chercher dans l’atelier d’écriture

et déjà première chose c’est pas clair d’avance pour toi c’qu’on vient chercher dans l’atelier d’écriture mais tu vois bien que certaines choses elles se bousculent à l’intérieur c’est quelque chose de très lent - mais c’est bien là - alors tu disais c’est bientôt la fin de la séance maintenant ça te dérange plus vraiment de lire comme ça devant ceux qu’tu connais pas parce que les premières fois - se mettre à parler là devant tout le monde alors que bon c’est pas vraiment un problème parler devant des gens tu sais faire c’est un métier et ça met d’la bouffe dans l’assiette ça paye les billets d’avions l’essence pour le bitume - l’ordi pour écrire l’appareil photo les bières toutes ces choses - mais parler devant des gens comme ça avec tes mots qu’t’as mis une heure en général pour les taper avant t’as fumé une clope en discutant - t’as parlé un peu avec elle qu’est venue là avec la même machine pour taper dessus et qu’on a des mots qui s’ressemblent pas mal souvent - tiens bah faudrait lui demander aussi c’qu’elle vient chercher dans l’atelier d’écriture -

je suis allé vous chercher dans la bibliothèque mais je vous ai pas trouvé, on a commencé

oui parce que voilà - on se met sur les fauteuils et y’a la route en bas les bagnoles qui passent dans la nuit le vigile qui va se reposer dans la petite salle - ça dure peut-être une minute pas plus il enlève ses chaussures il s’assoit et puis il les remet tout de suite et se relève il reprend son poste pas sûr qu’tu puisses faire ça toi - tenir comme ça debout des journées entières à regarder les gens lire des bouquins bosser - encore que l’autre jour tu l’as vu il avait pris un bouquin - et puis après le reste du temps ça bouscule pas mal quand même - oui voilà c’est ça c’est comme se faire bousculer l’atelier d’écriture - il est là souvent devant son ordi on se met dans la salle devant les machines et on attend - après il se met à parler à parler ça dure souvent plus d’une heure il dit souvent qu’c’est trop d’parlage - enfin il dit pas "parlage" chais plus vraiment c’qu’il dit - et en même temps ça march’rait pas - si y’avait pas l’parlage comme ça pendant une heure c’est comme une montée en tension on voit pas bien où il veut aller et puis souvent c’est dans les dernières minutes ou les dernières secondes juste avant qu’il distribue quelques feuilles photocopiées il rajoute une phrase ou deux et ça suffit ça se cristallise quelque chose dans le genre mais les mots comme ça c’est un peu trop -

c’est vrai qu’à un moment on peut pas faire l’économie de certaines lectures : Proust, Céline, enfin d’autres aussi

alors voilà c’est ça - ça nous bouscule on sait pas vraiment on a quand même des habitudes d’écriture comment on se met devant la machine et pourquoi - comment ça vient tout ça alors que là c’est différent - on n’explique pas trop comment ça comment quoi - comment ça se fait encore qu’ça vienne nous bousculer assez loin sans changer nos territoires - on pourrait se dire que c’est la façon d’entrer dedans qui s’bouscule et pas que - la façon d’en sortir aussi puisqu’à chaque fois c’est lire devant d’autres - c’est qu’les mots ils passent d’l’écran à la bouche et qu’ce ch’min c’est pas toujours simple -

ce soir - 27 décembre 2010 - l’atelier a pas mal bousculé - nos chemins d’écriture et c’qu’on y met - c’est un peu comme si ça se tremblait pas mal à l’intérieur - et qu’on allait attendre un peu - qu’nos langues elles se fassent - qu’ça nous sorte comme un brut - et les plaines immenses qui s’ouvrent dingues.

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